7. Déjà 7 clopes dans le cendrier avant d’écrire le moindre mot de ce que je croyais pourtant être mon « article » le plus instinctif.
C’est comme ça que devait commencer ce texte concernant la sortie de l’album de Supafuh « 10 ans trop tard ».
Mais vu qu’il a 3 mois que j’ai arrêté de cloper, inutile de te décrire la durée de gestation de mes élans scribouillards.
Pourquoi cela aurait du être instinctif ? Parce que Supafuh est un pote, un vrai c’est-à-dire quelqu’un qui me connait très bien mais qui m’aime quand même.
Pourquoi cela ne l’a pas été ? Parce que je manque de talent pour slalomer entre critique lèche cul, article qui sert la soupe, pathos et émotionnel déplacé. Mais soit, je ne peux décemment pas passer à coté de « 10 ans trop tard ».
Logiquement pour une chronique de 1er album , les magazines s’empressent d’extraire 2 ou 3 punchlines, de mettre en évidence les feats, de créer une mythologie sur le passé, le crew, les abdos bref le pédigrée du rappeur. C’est donc que je vais évidemment pas faire ici.
Pas de mythologie disais je, car en tant qu’observateur privilégié du parcours de Supafuh, son travail consiste plutôt à révéler l’homme à travers l’artiste et non pas à se cacher derrière cet alter égo.
Avant d’être l’histoire d’un Mc, c’est donc l’histoire d’un mec comme aurait dit son ainé Coluche dont il a hérité les rondeurs, cette jovialité humaniste et l’attachement à la bande de potes.
L’ayant rencontré à une époque où ces 2 platines et sa mixette prenaient la moitié de la superficie de son appart, je me suis demandé dans quel merdier il allait se fourrer quand il m’a dit qu’il allait rapper.
Le rap indé c’est rempli de gentils couillons qui confondent venir d’un quartier et avoir du vécu, qui pensent que la sincérité suffit à la qualité d’une idée, qui pensent que le panurgisme sonore de la dernière tendance américaine fait office d’originalité en France, qui pensent que la 3ème personne de pluriel du verbe croire est « croivent » (Bon voila j’en fais trop, on dirait Teru).
Bref quand il va au carton, il n’a que son beat et son couteau. Enfin son couteau c’est plutôt un katana tant il a pris soin d’en affûter la lame en 10 ans de deejaying, beatmaking et de réalisation des albums des autres. Ce qui lui a permis d’éviter les écueils pour son propre opus.
On sent l’album du mec qui a fait ses classes et qui connait ses classiques en terme de grain, de mix et de direction artistique tout en évitant le syndrome du beatmaker rappeur se sentant obligé d’en faire des caisses. Et c’est exactement là que l’album fait mouche, dans le dosage des ingrédients qui le compose pour en faire un disque sincère, généreux et élégant. En ces temps de racolages sonores auto-tunés, c’est pas dégueu.
La volonté d’être compris fait que le flow n’est pas des plus techniques, L’envie de ne pas tricher rendent les paroles plus « raisonnables » et moins spectaculaires. Mais c’est à ce prix là que vous aurez entre les mains un album de parti pris, dense (10 titres comme à l’époque où les rappeurs ne se sentaient obligés de faire 22 titres pour compenser la vacuité des lyrics) d’un passionné.
Y’a ceux qui surfent sur la vague et ceux qui creusent leur sillon. Un mec qui sort un album en vinyle en 2010 est forcément de la 2 ème catégorie.
http://supafuh.bandcamp.com/
http://www.supafuh.com/
http://soundcloud.com/warefuh/sets/10-ans-trop-tard-les-singles
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